Le jeu coopératif, une pédagogie du « faire ensemble»
Contrairement aux jeux compétitifs qui valorisent la victoire individuelle, les jeux coopératifs placent la réussite collective au premier plan : tous les participants gagnent ou perdent ensemble. À l’école, cette approche fait écho aux valeurs de la République : solidarité, entraide et respect mutuel. Les recherches en sciences de l’éducation montrent que ces jeux contribuent directement à développer des compétences sociales et émotionnelles essentielles — communication, écoute, gestion des émotions, engagement collectif et empathie
Un levier pour les apprentissages et le climat de classe
Les jeux coopératifs, lorsqu’ils sont intégrés dans la pratique pédagogique, favorisent la motivation intrinsèque des élèves et soutiennent les apprentissages dans plusieurs domaines. Les interactions qu’ils suscitent stimulent ce que les chercheurs appellent le conflit socio-cognitif, moment où les élèves confrontent leurs points de vue pour construire ensemble de nouvelles connaissances.
Ils participent également à la régulation du climat de classe : pas de perdant, pas d’exclusion, chacun occupe une place utile à la réussite du groupe. De telles expériences nourrissent la confiance mutuelle et permettent de vivre concrètement la coopération plutôt que de la prescrire.
Des exemples concrets pour la classe présents dans la Bulle de l’ISFEC
Le Verger (HABA) – Dès la maternelle, les élèves unissent leurs efforts pour cueillir les fruits avant que le corbeau ne les dévore. Ce jeu emblématique introduit la notion de tour de rôle, la lecture d’indices visuels (couleurs, symboles) et l’apprentissage de règles communes sans enjeu compétitif.
Karuba Junior (HABA) – Jeu de tuiles coopératif dès 4 ans : les enfants construisent ensemble des chemins à travers la jungle pour échapper aux pirates. Il stimule la prise de décision collective, la planification et la construction spatiale.
Tempo, kleine Fische ! (Ravensburger) – Ce jeu de déplacement collectif apprend à anticiper, compter, et accepter le rythme de l’équipe : avancer tous ensemble, sans se précipiter ni se laisser distancer.
3 littles pigs (Goula) – Version revisitée du conte, les 3 petits cochons doivent rentrer à la maison avant le loup.
Les Poilus (Sweet Games) – À partir du cycle 3, ce jeu d’une grande profondeur émotionnelle place les joueurs dans la peau de soldats de la Première Guerre mondiale. La coopération devient ici synonyme de solidarité face à l’adversité : entraide, soutien moral et communication non verbale.



Jouer à coopérer, coopérer pour apprendre
Ces jeux créent des situations authentiques où les élèves expérimentent la valeur de la coopération pour réussir un objectif commun. Ils développent la capacité à :
- écouter et comprendre les autres points de vue,
- ajuster ses décisions collectivement,
- apprendre à « faire équipe » malgré les différences de niveau,
- transformer la difficulté en défi partagé.
Au-delà du jeu, ils préfigurent une posture d’élève-chercheur et citoyen, capable de construire, d’argumenter et d’agir avec les autres. En formation, ces jeux constituent de précieuses ressources pour expérimenter la pédagogie coopérative et réfléchir à la posture de l’enseignant : facilitateur, médiateur et garant du cadre bienveillant.
Jouer à des jeux coopératifs, c’est bien plus que partager un moment ludique : c’est apprendre à coexister, à construire ensemble et à transformer la compétition en collaboration. Dans le contexte scolaire, c’est un formidable outil de formation du futur enseignant — et du futur citoyen.
Lectures
Sanchez, É. (2015). Enseigner et former par le jeu. Paris : Retz.
Connac, S. (2022). Apprentissage coopératif ou pédagogies coopératives ? Éducation & Socialisation, 63, 1–17
Parlebas, P. (2025). Les jeux coopératifs et leur portée éducative. Envies & Enjeux.
